le blog stigny

La Maison de Stigny

12 Décembre 2006 , Rédigé par Jean-Pierre Nicod Publié dans #stigny

La Maison de Stigny
 
Elle était entourée de granges en ruines,
Une barrière en bois à demi écroulée
N’essayait même plus d’en défendre l’entrée.
Ses vieux volets rouillés avaient mauvaise mine.
 
Au fond d’un terrain vague s’écroulaient des bâtisses,
Leurs charpentes livrées aux pluies des quatre vents.
Là étaient les toilettes : Un tonneau dégoûtant
Surmonté d’une planche percée d’un orifice.
Sous leurs toits fatigués, deux granges encore solides
Flanquaient la cour-terrain où poussaient des orties.
Vastes mais sans excès, dans l’une une écurie,
Dans l’autre un beau volume amplifié par le vide.
Il partait de sa porte un mur de vieilles pierres
Qui reliait la grange aux murs de la maison,
Nous n’en connaissions pas encore la raison,
Elle allait, par la suite, nous faire quelques misères.
 
A droite de l’entrée, juste après la barrière,
Un appentis branlant manquait de s’écrouler.
C’était apparemment un ancien poulailler.
Face à lui la maison, une porte encore fière,
L’intérieur était noir de suie et de poussière.
Il n’y avait pas l’eau : il fallait la pomper
D’une citerne enfouie. Pour ne pas se tromper,
Aux pénombres du soir, il y avait la lumière !
Un néon chevrotant éclairait ma compagne,
Enfin il essayait. En voyant le chemin
Qu’il a fallut tracer pour arriver enfin
A ce lieu, mes amis, un vertige me gagne.
 
(Quand une union résiste à cette sinécure
C’est qu’elle est à coup sûr de la bonne cuvée
Et ne faiblira pas quoiqu’il puisse arriver)
 
Ce couple avait deux ans, Rome remplaçait Sparte,
Voilà que la Maison venait double l’appart’
(Merci Victor )
 
 Nous arrivions la nuit par les échafaudages
Des travaux en retard dans la maison glacée
Les enfants endormis aux lits étaient glissés
Sauf si l’EDF nous privait de chauffage.
Alors nous les prenions, à quatre sous la couette
Pour les tenir au chaud enlacés contre nous.
Ils étaient tous petits, comment donc voulez-vous
Dormir sans risquer d’étouffer ces crevettes ?
Donc on ne dormait pas mais la nuit était douce
Les enfants ronronnaient en dormant dans nos bras
Le bonheur absolu est simple comme ça
Inutile d’aller conquérir la grande ourse.
 
Nous avons tout connu : la citerne trop pleine
Qui inondait la cave, un pauvre chat perdu
Qui s’y était noyé y flottait, morfondu.
Pomper, désinfecter nous à pris la quinzaine
Je dis nous car c’est là que Jean et l’ami Jacques
Pour la première fois sont arrivés chez nous
Voir ces drôles d’oiseaux venus d’on ne sait où.
Ils furent bienvenus dans ce sombre cloaque
Et firent de leur mieux pour tirer de l’ornière
Ce charretier novice planté jusqu’au moyeu
Dans cette histoire d’eau et de chat malchanceux.
Et depuis ce temps là se sont mes deux compères.
 
Après vinrent tant et tant de pannes et de problèmes
Qu’il serait impossible d’en dresser un état.
Tout nous est arrivé au bout du résultat
Mais, pour nous voir ici, vous voilà tous quand même.
Nous en avons mangé des sortes de poussières,
De ciment, de sciure, de plâtres et de gravats,
Sauf quand il pleuvait car la boue était là,
Gluante, humide et froide, terreuse et familière
Mais ce fut notre vie, elle en vaut bien une autre.
Ce que nous avons fait ne sera pas perdu.
Si les enfants le veulent, il n’est pas défendu
De relever le gant  et d’être nos apôtres
Et, s’ils n’en veulent pas, ceux qui prendront la suite,
Auront ce privilège, la terre et la Maison,
A eux l’honneur ultime à travers les saisons,
Habitant le logis, de donner au village
Les murs et les toits, les haies et le gazon,
L’entretien sans faiblir, gardant avec raison,
Les bâtiments debout et l’ordre au paysage.
 
Anniversaires de Juin 2005         
Jean-Pierre Nicod Juin 2005

 Martine et la chatte Prune à la fenêtre qui est maintenant la porte sur la rue. Fin 1976  ou printemps 1977. Les travaux initiaux sont déjà avancés, on voit l'évent de la fosse sceptique le long de la gouttière. Emmanuelle est déjà née, Gabriel va bientôt suivre

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article